Adoption de la Loi sur la compensation des dommages résultant de violations du droit de la concurrence

Le 15 novembre 2016, le Parlement luxembourgeois a adopté la Loi relative à certaines règles régissant les actions en dommages et intérêts pour les violations du droit de la concurrence et modifiant la loi modifiée du 23 octobre 2011 relative à la concurrence (la “Loi”).Elle transpose la directive 2014/104/EU du 26 novembre 2014 régissant les actions en dommages et intérêts en matière de concurrence (la “Directive”). 

La Loi reflète les objectifs de la Directive: d’une part, améliorer l’efficacité de la mise en œuvre du droit de la concurrence par des actions en dommages et intérêts sur l’initiative de la sphère privée à l’égard de violations du droit de la concurrence de l’Union européenne et national et, d’autre part, coordonner de telles actions et la mise en œuvre du droit de la concurrence par la Commission européenne et les autorités de concurrence nationales.

En premier lieu, la Loi facilite les actions en dommages et intérêts par l’introduction de certaines mesures procédurales spécifiques.

Premièrement, l’exercice de telles actions est simplifié par une série de présomptions concernant l’existence et les effets d’une violation du droit de la concurrence:

  • une présomption irréfragable qu’une telle violation a été commise s’il existe une constatation en ce sens dans une décision définitive du Conseil de la concurrence;
  • une preuve de l’existence d’une telle violation quand elle est établie dans une décision finale d’une autorité de concurrence d’un autre Etat Membre;
  • une présomption réfragable que les violations commises dans le cadre d’une entente causent un préjudice; et
  • une présomption réfragable pour l’acheteur indirect qui introduit une action en dommages et intérêts quant à la répercussion à son encontre du surcoût résultant d’une violation du droit de la concurrence, le défendeur disposant toutefois à son tour d’un moyen de défense dans le cadre d’une action intentée par un acheteur direct quant à la répercussion par ce dernier d’un tel surcoût au niveau inférieur de la chaine de distribution.

Deuxièmement, l’accès aux preuves, essentiel dans les affaires en matière de droit de la concurrence, est rendu plus facile par certaines règles relatives à la production de preuves. A la demande du requérant, le juge peut, sous certaines conditions relatives à la proportionnalité d’une telle demande, ordonner la divulgation d’informations, y inclus en ce qui concerne des éléments de preuve dans le dossier d’une autorité de concurrence. Cependant, compte tenu de leur importance pour la mise en œuvre du droit de la concurrence par la sphère publique, des déclarations faites par des sociétés aux fins d’une demande de clémence et des propositions de transaction sont protégées: leur divulgation ne peut pas être ordonnée et les preuves y afférentes obtenues uniquement grâce à l’accès au dossier d’une autorité de concurrence sont irrecevables. D’autres preuves, y compris celles établies par une autorité de concurrence et envoyées aux parties au cours de sa procédure, ne peuvent être divulguées qu’une fois qu’elle a clos cette procédure. En tout état de cause, la production de preuves confidentielles est entourée de certaines mesures protectrices.

Troisièmement, sous réserve de certaines règles spécifiques pour les petites et moyennes entreprises et les bénéficiaires d’une immunité d’amende, les entreprises qui violent conjointement le droit de concurrence sont solidairement responsables de l’intégralité du préjudice causé par la violation de sorte que la partie lésée a le droit d’exiger de chacune d’elles la réparation intégrale de ce préjudice jusqu’à l’indemnisation intégrale.

Quatrièmement, la Directive imposant aux Etats membres de veiller à ce que les délais de prescription applicables aux actions en dommages et intérêts soient de cinq ans au minimum, la Loi réfère à cet égard aux principes de droit commun luxembourgeois qui prévoient un délai de prescription de dix ans pour les actions commerciales.

En second lieu, la Loi encourage le règlement consensuel des litiges. Conformément à la Directive, elle prévoit la suspension du délai de prescription fixé pour introduire une action en dommages et intérêts pendant toute la période de règlement consensuel du litige ainsi que la suspension des procédures relatives à l’action en dommages et intérêts pendant une période pouvant aller jusqu’à deux ans. De plus, certaines règles régissent la récupération du reliquat de la demande en dommages et intérêts de la partie lésée partie à un règlement consensuel.

Enfin, il mérite d’être relevé que la Loi ne contient pas de dispositions relatives aux actions collectives nonobstant la Recommandation de la Commission du 11 juin 2013 invitant les Etats Membres à prévoir des mécanismes de recours collectif. 

Afin d’obtenir des informations complémentaires sur l’impact de la Loi, veuillez contacter Léon Gloden, Partner.